CERCLE, CARRÉ ET AUTRES ESPACES
pour Àlex Mitrani
texte du catalogue pour l'exposition au Centre d'Études Catalanes, avril 2015
Sabine Finkenauer (Rockenhausen, Allemagne, 1961) a étudié à l'Académie des Beaux-Arts de Munich dans la spécialité de sculpture, mais depuis son arrivée à Barcelone il y a plus de vingt ans, elle fait un virage vers la peinture. Elle partait d'une certaine influence de Phillip Guston dans sa figuration monumentale et ironique et par ses tonalités roses et pastel, si loin du pathos de l'avant-garde classique et héroïque. Vers l'an 2000 sa poétique avait déjà une personnalité définie, qui passait par la coexistence, ambigüe et sournoise, entre figuration et abstraction. Ses motifs récurrents étaient ceux du monde de l'enfance, les fables et le sentimentalisme kitsch des fleurs. Elle réussissait à les transmuer en des structures essentielles, synthétiques, presque architecturales. Elle mettait en pratique une révision ironique mais aussi sérieuse de la grande avantgarde au XXe siècle. Depuis Peter Halley, l'abstraction ne peut plus être vue avec la même solennité et respect qu'auparavant et on ne peut plus croire en sa pureté platonicienne. Sabine Finkenauer a su se livrer à l'un des exercices critiques et analytiques les plus subtils sur ce désenchantement.
Ses derniers séjours à Paris, où elle a travaillé intensément, ont contribué à ce dialogue, en rien primaire ou évident, mais fondamental, avec les origines de la peinture moderne. Sabine Finkenauer a éliminé peu à peu les références narratives de son oeuvre et s'est concentrée de plus en plus sur le problème de la géométrie et de l'espace (mental ou habité). C'est pourquoi l'on se permet une comparaison avec ce groupe promu en 1929 par Joaquín Torres-García et Michel Seuphor, appelé Cercle et Carré, qui comprenait des personnalités comme Piet Mondrian dans leur revendication de l'abstraction géométrique. Pour son exploration du langage géométrique, Finkenauer, utilise le dessin sur papier comme support préféré, mais aussi le tissu ou le bois. En fait, ce support n'est pas seulement un support mais l'œuvre elle-même qui, de la bidimensionnalité, génère des dimensions insoupçonnées à partir de processus élémentaires : coudre, coller, plier, tracer, superposer... Comme dans les jeux éducatifs conçus par le pédagogue romantique Friedrich Fröbel, l'avant-garde, la capacité de créer des images et des structures nouvelles, surgit du plus simple.
Centre d'Études Catalanes (La sorbonne).
9, rue Sante-Croix de la Brotonnerie, 75004 Paris.
Jusqu'au 10 d'avril.
